
Regarde ce désert, Yeruldelgger. C’est notre pays. Grandiose. Sévère. Violent… Ce qui nous rend fort, c’est ce pays cruel qui nous apprend à le combattre et à le respecter depuis notre plus tendre enfance. (Ian Mannok. La mort nomade)
Certains animaux sont agressifs en tant que prédateurs. J’observe actuellement devant ma verrière en Floride les eaux agitées de l’Indien River et, tous les jours, je vois la mort déferler gracieusement, par le plongeon en piqué du pélican ou le survol en rase-motte de l’orfraie, par les circonvolutions rapides et nerveuses du dauphin et par les furieux remous de l’onde provoqués par le malachigan agressif qui dévore tout ce qui vit. C’est fascinant et suis-je content de ne pas être un petit poisson argenté ondulant avec légèreté dans ses eaux ? Étonnant d’être ému par une nature aussi belle et simultanément aussi féroce, car en se laissant charmer par le dépôt de franges d’or du levant sur le bleu myrtille de l’eau, c’est la mort là-dessous, violente, qui ne pardonne pas. Mais ce n’est pas le Mal !
Bien sûr, les gens sont toujours frappés par l’horreur de voir certains comportements humains aussi aberrants. Tuer ses propres enfants de plusieurs coups de couteau suite à une rupture (Turcotte). Enlever un enfant de 9 ans en plein jour pour le séquestrer, le violer pour ensuite le précipiter dans un réservoir d’huile vide pour qu’il y reste (Defoy). Forcer deux adolescents à subir les pires outrages sexuels pour ensuite les jeter vivants en bas d’un pont comme des ordures (Guérin-Pimparé). Forcer quatre enfants à faire la pose, les violer à de multiples reprises et les étrangler (Dion) ou plus récemment violer et tuer froidement des femmes chez elles sans aucun remords (Clifford Boden et William Fyfe). Tuer et de démembrer ses victimes (Archambault) ou tuer de jeunes étudiants avec une arme semi-automatique (Lépine et Kimveer Gill). Pénétrer au parlement pour y abattre tous ceux et celles qu’il rencontre (Caporal Lortie) ou dans une mosquée et faire feu sur les gens qui s’y trouvent (Bissonnette). Se promener en guerrier médiéval et attaquer des promeneurs en tuant deux d’entre eux avec un katana japonais (Girouard).
Ce sont là des horreurs bien de chez-nous, au Québec. Nombreuses pour si peu de population et non pas d’exotiques et pénibles gestes commis par d’obscurs tueurs provenant du plus profond des États-Unis ! Sont-ce des comportements purement hérités de leurs restants de bêtes ? Sont-ce des maladies congénitales ou acquises suite à de quelconques traumas physiques ou mentaux? Sont-ce des déviances hormonales ou de véritables choix pris par des gens foncièrement mauvais ? Ont-ils été influencés et guidés par des forces obscures ? Comme le Diable des légendes ? Bref…
…existe-il des êtres humains mauvais fondamentalement et à tous les niveaux ?
On a envie de crier un OUI percutant, mais il semble que le Mal, le Vrai, obéisse à toute autre provocation que des conditions de vie misérables, des giclées d’hormones dans un cerveau primitif mal conçu dès le départ et fort mal entretenu des années durant, ou des drogues qui animalisent l’être humain au point qu’il n’en réchappe pour ainsi dire jamais.
Comme déjà dit pour découvrir le Mal, nous devrons d’abord le distinguer du mal.
En effet, où se situe le Mal si sa manifestation est similaire à celle d’un prédateur de la savane capable d’entrer dans une hutte isolée et filouter un enfant qui sommeille pour le dévorer en silence dans les herbes Rhodes ? (250 attaques par année en Afrique)
En juillet 2008, un petit garçon de huit ans s’amuse en vélo avec ses copains dans une rue de Saint-Romuald sur la rive-sud de Québec. Ce n’est pas la jungle ou la savane ou un quartier mal famé de Rio, il n’y existe là, aucune culture de violence, c’est même un quartier très paisible et sans histoire et pourtant ! Le prédateur, la hutte, les herbes hautes, tout y est !
C’est à la stupéfaction générale des autres enfants qu’un véhicule s’arrête au milieu de la rue et qu’en sort Pierre Defoy, un concierge, grand et mince, d’une cinquantaine d’années. Son comportement est celui d’un fou en proie à une crise incontrôlable, mais ce qu’il va faire dépasse le scénario du plus mauvais film réaliste qu’on puisse imaginer.
Il ouvre son coffre de voiture, attrape à la volée le premier petit garçon qui passe à proximité et le projette violemment dans le coffre qu’il referme pour s’enfuir sur les chapeaux de roue. Pierre Defoy, tel un tigre du Bengale emmène sa proie dans sa tanière, le sous-sol de l’immeuble où se trouve son atelier sur la rue Belvédère à Québec. C’est sa tanière[1]. Il l’agresse sexuellement et l’enferme aussitôt dans un réservoir d’huile à chauffage vide. On ne saura jamais s’il avait l’intention de laisser l’enfant en mourir sur place, mais on peut le penser.
Grâce à un témoin, Ryan Murphy qui le suit en automobile et voit brusquement le petit ouvrir le coffre alors que le véhicule est à un feu rouge et Defoy sortir et refermer violemment celui-ci, il sera interpellé à son travail par les policiers et l’enfant, sain et sauf, sera libéré de son infâme prison. Pierre Defoy recevra une sentence de 23 ans de prison sans parler d’autres à venir.
Tous ceux et celles qui viennent de lire ce texte n’hésiteront pas un seul instant à s’écrier que cet homme incarne le Mal non ? Alors Defoy est une manifestation du Mal ? Avant de répondre trop hâtivement, nous allons d’abord pénétrer dans un lieu sombre, hirsute, imprévisible et complexe, celui de la nature humaine avec tous ses couloirs ténébreux tant ceux de l’inné que de l’acquis. Dans cette série d’article sur le Mal, il n’y aura pas de précipitation, nous allons avancer, pas à pas, si vous en avez la patience. L’idée qu’il existe une forme de personnalité criminelle remonte aux années 60 alors que Jean Pinatel[2] proposait sa théorie, toujours d’actualité, pour certains tests et grilles d’évaluation psychiatriques. Le profil d’un être mauvais serait celui d’un humain foncièrement égocentrique, agressif, dominé par le besoin d’être dominant, intolérant à toute forme de frustration, indifférent au sort de ses victimes et n’ayant pour ainsi dire aucune morale[3].
Le mal a une réputation quelque peu restreinte par l’impression que la violence, le sang y sont toujours associés, mais ce n’est pas toujours un crime abject et violent qui définit le mal. Bernard Madoff a escroqué pour plus de 65 milliards de dollars américains sans heurter la moindre mouche. Peut-être encore plus odieux, le crime du PDG de Norbourg, Vincent Lacroix, qui au début des années 2000, escroquait plus de 9600 petits investisseurs pour une valeur de 150 millions de dollars. Les sommes ne se comparent pas, mais les investisseurs floués non plus ne se comparent pas. Ceux de Madoff sont en général des multimilliardaires et des entreprises bancaires – ce qui n’excuse aucunement le geste – mais dans le cas de Lacroix, ce sont de petits épargnants qui ont vu fondre leurs avoirs destinés à leur retraite qu’ils ont dû annuler pour plusieurs. Un personnage malsain s’il en est, mais non violent. Son geste est ignoble, il faut être une mauvaise personne pour agir de la sorte et commettre avec le sourire 9600 crimes !
Voler un vieux ou une vieille en la dépossédant de ses économies comme le font un très grand nombre d’enfants voire de petits-enfants est un crime ignoble qui rappelle ces rats qui s’introduisent partout pour rapiner tout ce qui se mange. Il en va ainsi du drogué en manque qui ne supporte plus son abstinence forcée et défonce la porte d’une maison pour en agresser les résidents. Nous avançons, mais passons à du costaud !
Ce qui va suivre au cours des prochains articles est de nature crue, violente et abjecte. Léo-Paul Dion, et ceux qui vont suivre, sa vie, ses gestes, sa nature, ne sont qu’une série d’abominations, mais surtout d’anomalies comportementales et il est essentiel d’y faire face si on veut comprendre le mal et le différencier du Mal.
Cela dit, sachez que je ne suis pas un adepte du petit journal jaune, ces périodiques de mon époque qui se délectaient dans la description de crimes horribles pour répondre aux trois « S » du journalisme d’un certain propriétaire de journaux très connu : le sexe, le sang et le sport ! Je ne vais pas m’étendre sur la gestuelle criminelle et odieuse de l’individu, mais je me tiendrai juste assez près du précipice funeste au fond duquel il a vécu toute sa vie de sorte que vous puissiez en apprécier la profondeur.
Prochain article (3) : L’Affaire Léo-Paul Dion
[1] Je suis sous le choc en l’apprenant par la radio. J’ai vécu à cet endroit en 1975.
[2] Criminologue français 1913-1999 à ne pas confondre avec Philippe Pinel, précurseur de la psychiatrie (1745-1826)
[3] Traité de droit pénal et criminologie, 1963.
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Esprit d’abord, humain ensuite
Jean Casault développe ici sa propre philosophie en titrant ce livre par sa devise personnelle qui lui fut révélée en plein Vol de Nuit. Il répond ainsi à toutes les questions existentielles qui puissent exister. D’où viens-je ? Qui suis-je ? Où vais-je ? Tout y est, dans une simplicité tout aussi divine que désarmante.
Disponible en librairies, en bibliothèques ou peut être commandé chez l’éditeur ou Amazon.
Catégories :Le Mal
Le Mal et le mal existent, Ont-ils une couleur différente?
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Le Mal existe pour qu’il puisse y avoir un choix conscient à faire. Pas de mal, pas de choix pas d’évolution.
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Oui je crois que le mal existe, peut-être plus sur certains humains que d’autres le pourquoi je ne le sais pas et je crois que chaque êtres humains à un côté sombre et de lumières, un prédomine sur l’autre
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